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Camila sortira ce soir

Entretien avec Inés María Barrionuevo, réalisatrice

Qu’est-ce qui vous a plu dans le scénario pour que vous décidiez d’en faire un film ?

C’est une histoire d’adolescents, mais centrée sur le harcèlement. Curieusement, j’avais pensé à faire un film sur un personnage adolescent dans une école de Cordoue et ces deux mondes se sont un peu mélangés. Ce projet était un défi pour moi : je suis toujours seule pour écrire mes films, avec mes chats et mon compagnon. Cette fois, j’ai eu l’impression d’aller un peu plus loin. Comme si j’acceptais d’être une réalisatrice plus mature, capable de prendre des risques sur le projet de quelqu’un d’autre, en travaillant avec un scénariste que je ne connais pas. Pour arriver à un projet convaincant et qui me plaise au point d’en faire le mien, Camila est devenue un personnage fondamental pour moi. Je pense à elle comme si elle existait vraiment, je parle d’elle comme si elle était ma voisine. 

Vous aviez déjà abordé le sujet de l’adolescence dans Las motitos, qu’est-ce qui vous attire chez les adolescents ? 

Les turbulences que l’on rencontre à cette étape. Tout est à venir mais en même temps, ils vivent chaque jour comme si c’était le dernier. Tout est passionné, comme un tourbillon d’émotions. Mon premier film (Atlantida) portait sur les adolescents, le second était plus sombre (Julia y el zorro) et maintenant je suis de retour à l’adolescence. C’est comme ça que fonctionne l’art : on revient toujours aux mêmes thèmes. 

Quelles ont été vos sources d’inspiration pour le film ? 

Cette génération de filles qui a grandi dans une situation différente de la mienne m’a beaucoup inspirée : les voir dans les manifestations, défendre le droit à l’avortement... Nina (qui interprète Camila), n’avait que 18 ans au moment du tournage : elle terminait elle-même ses études tout comme son personnage. 

Le déménagement de La Plata à Buenos Aires répresente un grand changement pour Camila, tout comme son entrée dans une école privée. Pourquoi est-ce si différent pour elle ? 

En Argentine, il existe une classe sociale très forte, très consciente des problèmes sociaux et très favorable à l’éducation publique. Une personne qui quitte la capitale, même si elle fait partie de la classe moyenne, subit un changement important. Mais le quartier dans lequel Camila déménage est Recoleta, l’un des plus riches de Buenos Aires. Vous pouvez y vivre comme si vous étiez à la campagne, dans une bulle complétement isolée du monde extérieur. 

Cette évolution vers un environnement plus oppressant et hermétique est également suggérée par des couleurs aseptisées, très éloignées de vos films précédents. 

Nous avons consacré une grande partie de notre travail à trouver la palette de couleurs que l’école devait avoir et à nous assurer que de plus en plus de couleurs apparaissent au fur et à mesure que l’histoire progresse. Lorsqu’ils sortent en club, il fallait un contraste entre l’institution et la fête, entre le gris et la couleur. Nous ne voulions pas de couleurs qui attirent trop l’attention, tout oscille entre les gris et les bleus, des tons plutôt froids. Les institutions sont toujours un peu comme ça, un peu comme une prison, et Camila vient ouvrir le monde extérieur à tous les autres personnages. 

L’équipe de Camila sortira ce soir est composée à 80% de femmes. Dans quelle mesure cela est important pour un film comme celui-ci, qui comporte des scènes de sexe entre deux filles ? 

Il est très différent pour une femme de tourner une scène de sexe avec un homme en face d’elle plutôt qu’avec une femme. Au-delà des raisons évidentes, il est question du regard, de la sensibilité, de la façon dont ces scènes sont faites. Ce sont des choses très subtiles, comment on entre sur le plateau, comment on parle ou comment on place l’équipe de tournage, qui historiquement a presque toujours été composée d’hommes rudes. J’ai entendu Margot Robbie dire qu’elle était très embarassée pendant le tournage du Loup de Wall Street, il y avait 30 hommes autour d’elle pour tourner une scène de masturbation, je trouve cela terrible... Heureusement, les quelques hommes qui faisaient partie de l’équipe de Camila sortira ce soir étaient merveilleux et tout était très harmonieux. Mais je pense que si nous parlons d’un film sur la sexualité, sur les femmes... alors l’équipe doit être en phase avec cela. Je sais qu’il y a des réalisateurs qui ont des méthodes extrêmes pour obtenir le meilleur de leurs acteurs, mais ce n’est pas mon cas. J’aime travailler à partir de l’harmonie, du dialogue. Pour moi, le tournage est le moment le plus joyeux de ma vie, lorsque je fais ce que j’aime le plus au monde, c’est-à-dire écrire et réaliser.

(Dossier de presse) 

Camila sortira ce soir

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