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Mad God

Mad God par Phil Tippett

« Impossible de décrire Mad God. Pour moi, c’est comme créer un récit que le public va lui-même compléter. Tous les objets sont très identifiables du point de vue de notre expérience quotidienne, mais ils sont assemblés de manière plutôt brisée et reconfigurée. Je ne dirais pas que c’est surréaliste – disons qu’on aurait recours à un cadre de référence de l’ordre de l’inconscient pour construire des choses. La forme finale de Mad God, c’est le souvenir qu’on en a après visionnage ; c’est comme se réveiller et explorer le souvenir d’un rêve qu’on vient de faire. C’est ça, l’expérience. Pas le film lui-même – le film est seulement un moyen d’y parvenir. 

Beaucoup d’idées sont volées aux rêves. L’imagerie de Mad God n’est pas futuriste, plutôt de l’ordre de l’icône. Toutes ces images relèvent de notre inconscient collectif, la question est donc : comment chaque personne choisit de les associer dans son esprit. Aucune des images ne provient d’un rêve en particulier, mais l’ensemble est influencé par ce genre d’expérience humaine. 

Mad God fonctionne dans le cadre d’une structure très limitée, mais pour moi, il est important que le projet ne soit pas régi par l’intention. Je laisse l’œuvre me dire ce qu’elle veut être – je suis comme un abbé dans l’église de Mad God et je fais ce que la divinité me dit. » 

LA GENÈSE DE MAD GOD

« Le processus a été très long. Mad God est né de ma découverte de Jérôme Bosch, de Pieter Bruegel l’Ancien et de son fils lorsque j’avais environ dix ans. Cela a infusé depuis. Je voulais faire un film inspiré par eux. À mesure que mon éducation se développait, j’ai pris conscience qu’il ne s’agissait pas simplement d’images fantaisistes, mais de produits de leur époque. L’horreur, pour Bosch, c’était l’enfer et la damnation. Pour Bruegel, il s’agissait d’une réalité imaginaire exacerbée qui était une chronique de l’époque brutale dans laquelle il vivait. 

À la fin des années 1980, ces idées ont pris la forme du projet Mad God. J’avais envie de faire de Mad God une zone peuplée de fantômes et d’habitants de notre culture longtemps après sa disparition. Il s’agirait d’un agrégat d’angoisses, de peurs, d’espoirs, de rêves et de compulsions utilisés pour créer une gestalt. J’ai conçu Mad God comme un mythe infantile transgressif. J’avais lu beaucoup de choses sur les mythes primordiaux de la création et de la destruction dans diverses cultures anciennes. Mad God ne devait pas être surréaliste, avec les juxtapositions brutales associées à ce mouvement. Il s’agirait plutôt d’un récit contigu. […] »

UN FILM À MESSAGE ?

« Je ne veux rien dire. Je me souviens de ce livre génial où des artistes célèbres conversaient sur l’art et les déclarations. L’une des plus grandes déclarations était qu’il n’y avait jamais eu de bon artiste qui était sincère. Il y a beaucoup de mauvais artistes qui sont sincères. Beaucoup de grands artistes étaient des escrocs, des criminels et des menteurs ! Je n’essaie pas de dire quoi que ce soit. Mad God est le reflet de beaucoup de choses qui m’ont influencé. Mais c’est tout à fait secondaire.

Il y a une réflexion sur l’absurdité du monde dans lequel nous vivons et sa folie. Il a pris forme comme les dadaïstes – ou plutôt comme les soldats dans les tranchées pendant la Première Guerre mondiale, témoins des changements technologiques les plus horribles. C’était cet énorme schisme entre l’ancien et le moderne, dans les circonstances les plus horribles que l’on puisse imaginer.

Mais ces gars dans les tranchées ont écrit ces lettres avec beaucoup d’humour. C’était leur façon de transformer une expérience difficile à exprimer et de la retranscrire avec humour. C’est ça, la magie de l’esprit humain – avoir la capacité de faire ça. C’est à cela que je voulais que Mad God ressemble en partie. » 

Propos extraits et traduits du livre Mad Dreams and Monsters. The Art of Phil Tippett and Tippett Studio écrit par Alexandre Poncet et Gilles Penso (Cameron + Company, 2022)

(Dossier de presse) 

Mad God

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