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La conférence

Entretien avec Matti Geschonneck, réalisateur

Il y a 80 ans, une conférence a eu lieu dans une villa sur le Wannsee au cours de laquelle a été débattue la chose la plus monstrueuse qui soit : le meurtre systématique de tous les Juifs du Reich. Les participants à cette conférence ont discuté de la manière dont ces personnes devaient être tuées et de l'organisation de cette opération. En quoi ce film est-il important pour vous ?

Pour moi, il s'agit de faire connaître cet événement inimaginable et révoltant, cette conférence au cours de laquelle a été concerté, planifié et mis en œuvre, avec la plus grande efficacité possible, le meurtre de masse de onze millions de personnes, onze millions de Juifs. Certes, cela demeure, par sa nature même, un événement singulier dans l’histoire des hommes. Il n’en demeure pas moins que c’est un génocide et qu’il s'est produit à une époque pas si lointaine. Nous devrions tous en être conscients. C'est un événement qui a encore des répercussions sur notre présent.

Vous avez réalisé de nombreux films. La Conférence a-t-il été le plus difficile à faire ? 

Trouver le ton d’une œuvre défiant à ce point l’entendement - car pour moi le ton est ce qui détermine le caractère d'un film - n'a pas été chose aisée. Bien sûr, la responsabilité attachée au fait de s'attaquer à un tel sujet était déjà un défi en soi. C'est pourquoi j'ai mis si longtemps avant de me décider de le faire. S'agit-il du film le plus difficile ? C'était un film très spécial pour moi, bien entendu. 

Il n'y a pas de musique dans le film. Pourquoi cela

La musique est séductrice. La musique charme l'auditoire. Avec la musique, vous pouvez influencer de manière critique la perception du spectateur. C'est pourquoi la musique est très dangereuse et en même temps très vertueuse. Maintenir le cap d’un film sans musique, c'était d'une importance cruciale pour moi. Je voulais éviter, et même exclure complètement le risque de manipuler le public. 

Le film a été tourné en partie en studio et en partie dans la villa d'origine la réunion a eu lieu, et qui est désormais un centre commémoratif. Était-il plus difficile pour les acteurs de tourner dans un tel endroit qu'en studio

La plus grande partie du film a été tournée dans les studios de Berliner Union Film. Et Dieu merci, car les avantages d'un studio sont évidents. Nous n'étions pas dérangés, nous n'étions pas impactés par la météo, etc. Nous avons également tourné pendant la pandémie, ne l'oubliez pas. Ce qui signifie que le studio offrait un autre avantage : il était bien sûr beaucoup plus facile d'organiser tous les tests en travaillant en studio que lorsque nous tournions en extérieur. Nous avons passé quatre ou cinq jours sur place, 

dans la villa. La plupart des acteurs connaissaient l'endroit, ils savaient où ils allaient. Nous n'avons filmé que les arrivées, les départs et deux ou trois scènes de dialogue sur place. Mais il était bien sûr très important d'inclure ce bâtiment, le lac, toute cette zone. Mais pour les acteurs, j'irais jusqu'à dire que ce n'était pas un problème, comparé au studio. 

Quels critères avez-vous retenus lors du casting

Les protagonistes réels étaient relativement jeunes, l'âge moyen était de 42 ans. Heydrich avait 38 ans, Eichmann 35, Lange 32, je crois. Le plus âgé était, si je me souviens bien, Kritzinger, 51 ans. J'ai trouvé étonnant de voir à quel point ils étaient jeunes, à quelle vitesse ils avaient fait carrière dans cette période relativement courte de neuf ans depuis la prise du pouvoir en 1933. Mais pour moi, faire ce film, c'était raconter l'histoire de cet événement effroyable et inimaginable. Il s'agissait moins - et cela concerne bien sûr aussi le casting - de recréer la physionomie des protagonistes et d’en proposer une représentation naturaliste. Cela reste une fiction. Et pour le casting, j'ai bien sûr tenu compte du niveau de connaissances actuel et des documents que nous avions à notre disposition. En collaboration avec la directrice de casting Simone Bär et, bien sûr, après consultation des producteurs, c'est finalement l'intuition qui détermine le casting d'un film, et c'était également le cas ici. Il y avait 16 personnes, 15 hommes et une jeune femme. D’habitude, il y a un personnage principal - et pourtant, ici, ce n'est pas le cas : le personnage principal, c'est la conférence. Et l'interaction est très importante, il s’agit donc d’une performance d'ensemble. Cet ensemble devait fonctionner. 

Dans le film, le président de la réunion, le SS-Obergruppenführer Reinhard Heydrich, déclare : « ces messieurs doivent savoir à quoi ils ont participé. On ne dira pas qu'ils ne savaient pas. » C’est pour cette raison qu’un procès-verbal fut établi à l’époque. Dans quelle mesure le scénario est-il proche de ce procès-verbal ? 

Il ne s'agit jamais que d'un procès-verbal. Il existe des enregistrements d'autres réunions en rapport avec la Conférence de Wannsee. Mais même si l'on nous avait remis un compte-rendu in extenso de la réunion, un film demeure une fiction. Le choix des acteurs, les gestes, les expressions des visages, les intonations - tout cela procède de décisions prises par le réalisateur. Ce sont des décisions qui relèvent de la dramaturgie. Un film de fiction ne peut prétendre à la vérité. Pour moi, il s'agissait de raconter l'histoire de cet événement avec mes méthodes et mes outils.

(Dossier de presse) 

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