Tout film sur des adolescents pose un dilemme à son auteur : vaut-il mieux s’inspirer de sa propre jeunesse ou de l’adolescence d’aujourd’hui?
La question s’est posée en effet, et en fin de compte, on a construit le film en la laissant volontairement ouverte : dans quelle époque exacte se situe Normale ? De quelle adolescence s’agit-il ? D’un côté, j’avais envie de puiser dans mes propres souvenirs : Lucie, c’est moi à bien des égards, avec les doutes, les complexes, les fantasmes et les frustrations amoureuses qu’on a tous connus à cet âge-là. De l’autre, quand je travaille avec des acteurs adolescents, j’aime composer avec ce qu’ils sont « au présent », dans leurs propres vies, même si c’est très loin de ce que j’ai connu. Je me suis donc plu à refuser de trancher, et cette hésitation sur la temporalité a fini par donner son identité au film : il se passe dans une réalité qui n’en est pas tout à fait une. On est évidemment en France, mais… c’est une sorte de France qui voudrait se fuir elle-même !...